Les champs de repos Tarbais d' hier à aujourd'hui



Accueil
Origine du mot cimetière

Le cimetière Saint Jean:

Emplacements successifs
Au fil des allées

Le cimetière de La Sède:
Origine du mot La Sède
Emplacements successifs
Au fil des allées

Le cimetière Nord
:
Création du cimetière


Un nom: une rue,...
L' art funéraire au XIX ème
La symbolique


A la mémoire de ... :
1ére et 2ème guerre mondiale

 

 


 

 

 

 


RAYMOND SOLLADIE
(1914-1993)

Discours prononcé le 09 Décembre 1993, à l'église Saint-Jean par Charles Joineau; secrétaire général de la Fédération Nationale des Déportés Internés Résistants et Patriotes. Ancien du camps de Natzweiler.

En Raymond Solladié nous pleurons un ami.
La Fédération Nationale des Déportés et Internés, Résistants et Patriotes perd un excellent camarade qui animait avec un dévouement sans bornes l' Association des Hautes-Pyrénées. Ne se comptent plus les services qu'il a rendus aux survivants qui peuplèrent les prisons et les camps disséminés sur toute l'Europe de 1940 à 1945. Ne s'appréciera jamais assez son affectueuse sollicitude envers les veuves et les orphelins de nos camarades.
Et que dire du médecin qui aidait, qui soulageait, qui soignait bénévolement. Rappelons aussi le médecin qui cherchait à toujours mieux comprendre les séquelles de la déportation en coopération avec ses collègues déportés des autres pays au sein de la commission médicale de la Fédération Internationale des Résistants. Rien d' étonnant, à ce dévouement, quand on connaît l' homme d' exception que fut notre ami Raymond.
Entré dans la Résistance au sein de l' Armée Secrète à Montauban, il a été arrêté le 08 Mai 1944, un an tout juste avant la victoire sur les forces nazies. La journée du 09 Mai, il la passe dans la cave à charbon du siège de la Gestapo. Puis il est transféré à la caserne du 1er Régiment de Saphis à Montauban où il est enfermé dans le mitard.
Raymond témoigne : "être prisonnier dans la caserne où 5 ans auparavant j' avais effectué mon service militaire, me paru un comble .... d' ironie ou de chance. Je décidais que c' était un comble de chance, dont je devais profiter pour m' évader".
Il tentera cette évasion, mais en vain !
Interrogé, torturé, Raymond gardera malgré les souffrances sa dignité, ce qui honore cet homme de foi. Le 16 Mai 1944, il est transféré de Montauban à Toulouse à la prison Saint Michel dans laquelle le régime est sévère et la soupe plutôt maigre.
Le 14 Juin, a 60 par wagon à bestiaux en bois (50 hommes,8 cheveaux), c' est le "voyage" de Toulouse à Compiègne. Il durera 4 longs jours, du 15 au 19 Juin.
Le 02 Juillet, il sera du "convoi de la mort" pour Dachau où il arrivera le 5. Trois jours d' un transport à 100 et plus par wagon plombé. La faim, la soif, la pomiscuité supportées par ces hommes est indicible. Partis à 2400, ils ne seront plus qu' à peine plus de 1900 à l' arrivée. On retirera 500 cadavres mêlés aux survivants. Raymond est de ces derniers miraculés.
Ainsi, comme il le racontera plus tard, après "le drame du plus terrible des transports", la tragédie concentrationnaire va commencer !
A Dachau, il cessera d' être considéré par les S S comme un homme. Il deviendra le matricule 77 417. Aprés Dachau et jusqu' à la libération en Avril 1945, il connaîtra la vie et le travail dans des commandos installés dans la vallée de Neckar.
Son profond respect de la vie et de l' être humain associé à ses convictions et à sa profession, Raymond a pu durant ces moments les plus sinistres, indélébiles dans notre mémoire, soulager les souffrances des uns et des autres quels qu' il soient, croyants ou incroyants, Français ou étrangers. Les témoignages de gratitude de survivants envers Raymond Solladié abondent. Il en est de même pour le docteur Bent dont il a partagé la résistance et la déportation. Hier encore je recueillais des témoignages de camarades qui me disaient devoir la vie à l' admirable docteur Bent et à son gendre.
Homme d' une grande culture, d' une grande sensibilité, d' une grande générosité, Raymond a été, immédiatement après notre libération des camps, un infatigable porteur de mémoire. Mais toujours, selon la devise qui dominera tout sa vie : "ni haine, ni oubli".
Dans les collèges et les lycées par ses témoignages avec la grande modestie qui le caractérisait, Raymond a su faire comprendre aux jeunes ce qu' était l' enfer des camps nazis, mais ausi, a son exemple, ce que fut notre résistance à la déchéance, notre combat pour la dignité, contre l' avilissement. Comme Raymond l' a écrit: "nous les déportés ne sommes pas devenus des êtres passifs !". Et c' est vrai. Dans ce monde difficile où resurgissent les vieux démons,Raymond, homme mémoire était par là-même homme d' action, propageant ses idées de fraternité contre l' intolérance et de liberté contre toute oppression.
Le mémorial de la déportation, de l' internement et de la résistance des Hautes-Pyrénées et plus récemment le Musée sont deux créations auxquelles Raymond a consacré le meilleur de lui-même. Symboles de la fraternité née dans la clandestinité et dans les camps, ces lieux de mémoire resteront pour les générations futures le témoignage des sacrifices consentis par leurs aînés pour préparer le monde de liberté et de paix auquel nous rêvions quand nous avions vingt ans.
Raymond nous a quitté, mais son idéal demeure. Chère Madame Solladié, et vous ses enfants et petits-enfants qu' il chérissait, en vous présentant les condoléances de tous ses camarades de la Fédération, vous me permettrez d' y joindre le témoignage de mon amitié pour cet homme que j' aimais certes, que j' admirais sans doute, mai aussi et surtout que je respectais pour sa chaleur humaine, pour son amour du prochain.
Adieu Raymond.

Retour